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Le coeur du réseau : Paris
Durant
toute son existence, le rôle majeur du réseau télégraphique
consistera à transmettre dans les meilleurs délais
les informations et les ordres relatifs au gouvernement. Le siège
du pouvoir se situant à Paris, on y voit naître toutes
les lignes et le réseau tissera sa toile, avec pour cœur
la capitale, au fur et à mesure des besoins.
De même que tous les éléments du réseau
se mettent en place au coup par coup, les têtes de ligne
parisiennes vont s'adapter aux circonstances.
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Les
premières têtes de ligne :
La
première expérience ayant eu lieu entre Ménilmontant,
Ecouen et Saint-Martin-du-Tertre, elle devient tout naturellement
le point de départ de la ligne de Lille. En juin 1794 cependant,
le Comité de Salut public juge le premier poste trop éloigné
du lieu où la Convention Nationale tient séance
et décide que le pavillon central du Louvre doit recevoir
le télégraphe. Mais à partir du dôme
du Pavillon de l'Horloge, Ecouen n'est pas visible et le relais
suivant ne peut assurer une lecture correcte des signaux. On décide
donc d'établir une station sur la colline de Montmartre.
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En
octobre 1794, la construction de la ligne de Landau est décidée.
Chappe souhaite réunir sur le pavillon central des Tuileries
le départ de toutes les lignes. Un dispositif à
sept indicateurs, imaginé par le mathématicien Gaspard
Monge, doit améliorer la vitesse de transmission, mais
il ne sera jamais opérationnel, faute de crédits.
L'annonce du Congrès de Rastadt rend urgente la communication
avec Strasbourg. Une machine améliorée par rapport
à celle de la ligne de Lille est finalement installée
sur … l'église Saint-Sulpice.
Pour cause de nouvelle constitution qui organise la séparation
des pouvoirs, les différentes têtes de ligne sont
également séparées ; la machine est donc
placée sur la tour sud, inachevée, de l'église
Saint-Sulpice, devenue Temple de la Raison, puis de l'Etre Suprême
et désormais appelée Temple de la Victoire
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Dès
le mois de juillet de cette même année 1794, la nécessité
de réunir des informations sur les mouvements des navires
de commerce et de la marine anglaise ont fait accepter la réalisation
d' un système de correspondance rapide avec Brest. Après
l'échec d'un système de liaison avec pavillons,
Claude Chappe reçoit en 1798 pour mission de réaliser
cette liaison selon ses propres conceptions. Le poste de Paris
est établi sur le Ministère de la Marine.
Le second poste se trouve sur le Mont-Valérien, mais le
télégraphe se distingue mal sur un fond constitué
de bâtiments plus ou moins sombres ; on y remédie
en installant, en arrière, sur l'église des Feuillants,
un grand carré blanc servant de réflecteur. Fin
1798, les trois lignes sont devenues effectives
Voir carte
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Les réaménagements
napoléoniens:
En janvier 1799, Claude Chappe reprend la route pour
établir cette fois le tracé de la ligne d'Italie
par Lyon. Pour Paris, son choix est vite fait : il désigne
la grande tour de Saint-Sulpice, celle du nord, pour correspondre
avec Villejuif.
Bonaparte, Premier Consul, n'est pas très favorable au
télégraphe, surtout en temps de paix. A l'exception
de celle de Brest, il mettra les lignes en sommeil en 1802/1803
et veut débarrasser le Louvre de sa station télégraphique.
Il rêve en effet de faire du Louvre un musée à
sa gloire et d'y transférer la Bibliothèque Nationale.
Le télégraphe doit chercher un autre domicile et
en septembre 1806, le premier poste de la ligne de Lille est transplanté
sur l'église des Petits-Pères (Notre-Dame-des-Victoires).
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Quatre
têtes de ligne vers Lille, Strasbourg, Brest et Milan, réparties
sur trois édifices relativement éloignés,
créent de nombreux problèmes de transport des dépêches :
entre le bureau où on les rédige et les postes qui
les transmettent, entre les postes qui les reçoivent et
le service qui les traduit. Il faut aussi assurer la remise aux
destinataires. La création d'un poste central s'impose
et l'Hôtel Villeroy, au Faubourg Saint-Germain, semble
idéal. Depuis septembre 1794, ateliers et magasins de Claude
Chappe l'occupent, et il a même fini par y installer son
domicile.
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Les
toits et les terrasses de l'Hôtel Villeroy s'équipent
des machines nécessaires aux transmissions.Chacune des
lignes sera desservie par deux stationnaires. Le système
est opérationnel en 1806.
Voir carte.
Les
modifications sous la Restauration:
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Jamais
les Chappe n'ont pu obtenir des crédits pour faire fonctionner
leur télégraphe la nuit. Le contre-amiral de Saint-Haouen,
par contre, a réussi a se faire accorder par Louis XVIII
l'argent nécessaire ; il peut procéder en 1822 aux
essais de son système, des globes d'osier et des fanaux,
entre Paris et Orléans pour créer une ligne vers
Bordeaux et Bayonne. Mais, il se montre incapable de maîtriser
les difficultés, techniques autant que financières,
apparues et doit renoncer à son aventure.
L'affaire est reprise en fin d'année par les Chappe qui
réutilisent quelques constructions de leur prédécesseur.
A Paris, la meilleure solution pour aller vers le sud est de se
placer à nouveau sur Saint-Sulpice. La première
station de la ligne de Strasbourg va donc déménager
en avril 1823 sur l'église des Petits-Pères… pour
un temps.
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Elle
déménagera une dernière fois en 1834 sur
l'église Saint-Eustache parce qu'un peuplier, qu'un propriétaire
a refusé obstinément d'élaguer, bouche la
vue et qu'aucune loi ne peut le contraindre à le faire.
Dans les années suivantes, des opérations d'urbanisme
près de la Place Vendôme entraînent la démolition
de la dernière partie de l'église des Feuillants,
qui supporte le réflecteur indispensable pour obtenir,
du Mont-Valérien, une bonne lisibilité des signaux
du poste de la Marine. Abraham Chappe décide alors de construire
à Passy un poste intermédiaire. La machine télégraphique
du Ministère de la Marine ne servira plus que pour l'instruction
des inspecteurs surnuméraires.
La carte des têtes de ligne de 1826 montre le stade ultime
des transformations.
Voir carte.
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La centralisation
avant la fin :
A
partir de 1831, l'abandon de l'Hôtel Villeroy est sérieusement
envisagé, d'énormes réparations de toiture
étant devenus indispensables. Le Ministère de
l'Intérieur a décidé de regrouper autour
de son Ministère tous les services qu'il gère.
Des immeubles de bureaux vont s'installer rue de Grenelle, de
nouveaux bâtiments, près de l' Hôtel de Tessé
vont accueillir les services du Ministère du Commerce
et des Travaux Publics de création récente.
Au centre de tout l'ensemble, on prévoit pour répondre
aux besoins de l'Administration des lignes télégraphiques
une tour, véritable cœur du réseau, la seule en
France équipée de cinq machines.
Au bout de quatre ans de projets et de travaux, fin décembre
1841, les stationnaires des postes de Paris pourront recevoir
l'ordre "d'avoir à travailler désormais avec
le poste central de sa nouvelle administration "
Du haut de cette tour spécialement construite pour elle,
la télégraphie aérienne peut croire en
l'avenir pour de longues années encore. C'est oublier
que les brumaires ont préparé depuis longtemps
sa condamnation sans appel.
Peu à peu, le réseau électrique et les
voies de chemin de fer qui s'étendent rapidement sur
tout le pays vont avoir raison des télégraphes.
On ne sait pas exactement
à quelle date on démonte les machines à
Paris. Le télégraphe de Montmartre, qui avait
été la première station de la première
ligne de Paris à Lille, sera également la dernière
à être désaffectée. Il ne reste aujourd'hui
que quelques noms, d'une rue, d'une impasse et d'une station
de métro, ainsi que quelques gravures chez les bouquinistes…
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D'après
: G. CONTANT, « Monographie des lignes - Le cœur du réseau »,
in « La télégraphie Chappe », FNARH, 1993 et
« Les stations successives de Paris » in « La ligne de
télégraphie aérienne Chappe Paris-Strasbourg »,
Diligence d'Alsace, 1998.
Bibliographie
Saint-Sulpice
en 1840 vu par C.H. de Mirval |
Evolution
du coeur du réseau
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Pour
découvrir les différents stades du coeur du réseau,
mettre le pointeur de la souris sur la date souhaitée.
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