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Il eut été étonnant qu'un auteur aussi prolifique qu'Alexandre DUMAS Père ne nous ait pas laissé quelques lignes concernant le télégraphe. Le sujet cependant ne semble l'avoir guère inspiré car sur ses 257 volumes de romans, l'auteur ne s'en sert apparemment qu'une fois (?), dans "Le Comte de Monte-Cristo" paru en 1846. Le héros de l'histoire, Edmond DANTES, va se servir du télégraphe pour assouvir sa vengeance. Le Comte soudoie un stationnaire pour qu'il transmette trois faux signaux qui doivent provoquer la vente de coupons de l'emprunt espagnol et entraîner la ruine du banquier DANGLARS. L'affaire réussit et le lendemain, le MONITEUR annonce "Un signe télégraphique mal interprété à cause du brouillard, a donné lieu à cette erreur...". Il est certain que cet épisode de son roman (composé pendant les années 1841-1845) a été inspiré à DUMAS par différentes tentatives de création de lignes clandestines; en effet, à quatre reprises en 1836-1837, des hommes d'affaires, qui avaient besoin de moyens de communications rapides pour jouer à la Bourse et se heurtant au monopole d'état, avaient tenté d'établir des lignes clandestines entre PARIS et LYON, BRUXELLES, BORDEAUX,... Après quelques démêlés avec la justice, leurs tentatives avaient toutes échoué. "Le Comte de Monte-Cristo" marque un tournant dans la littérature concernant la télégraphie ; en effet, pour la première fois, le lecteur a droit à une magnifique description, très imagée, d'une station de télégraphe aérien et de son " moteur ". Il s'agit en l'occurrence de celle de MONTLHERY, "... insecte au ventre blanc, aux pattes noires...", qui n'est pas sans rappeler tout de même l'expression de son ami Victor HUGO qui parle à plusieurs reprises d'un "insecte noir" pour qualifier la machine : "J'ai vu parfois au bout d'un chemin, sur un tertre, par un beau soleil, se lever ces bras noirs et pliants pareils aux pattes d'un immense coléoptère, et jamais ce ne fut sans émotion, je vous jure, car je pensais que ces signes bizarres tendant l'air avec précision et portant à trois cents lieues la volonté Inconnue d'un homme assis devant une table, à un autre homme assis à l'extrémité de la ligne devant une autre table, se dessinaient sur le gris du nuage ou sur l'azur du ciel, par la seule force du vouloir de ce chef tout-puissant : je croyais alors aux génies, aux sylphes, aux gnomes aux pouvoirs occultes enfin, et je riais. ![]() Le Comte de Monte-Cristo ,1846, Tome II, chapitres V,(Ed. Gérard-Marabout, ). |
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