STENDHAL : le télégraphe au service de l'ambition et de la politique.

 
Stendhal

 
Si pour STENDHAL , comme pour d'autres écrivains, l'invention de Claude CHAPPE ne joue qu'un rôle mineur, il n'en entrevoit pas moins avec beaucoup de clarté le rôle que les moyens de télécommunication seront amenés à jouer, au service du pouvoir notamment.
Ainsi, il aborde une thèse très intéressante concernant le télégraphe dans son roman en partie autobiographique, rédigé entre 1830 et 1840 mais malheureusement inachevé, publié à titre posthume, intitulé "Lucien Leuwen" dont l'un des titres prévus était justement "Le télégraphe".
L'ouvrage est l'histoire d'un lieutenant, L. LEUWEN, petit arriviste intrigant qui a été chassé de Polytechnique et qui est envoyé à CAEN pour "faire" une élection. Il se heurte au Préfet du lieu. La maîtrise du télégraphe devient un enjeu vital dans leur lutte pour le pouvoir. Le télégraphe est également l'œil du ministre dans le département, la présence constante du pouvoir central, un moyen de pression par le biais de la rapidité de l'information.
 
L'utilisation du télégraphe par le héros de l'histoire n'est qu'une partie de l'intrigue; il finira par ne plus s'en servir :
"- Après avoir fait parler le télégraphe, le télégraphe parlera contre moi... Pourquoi toucher à cette machine diabolique ? dit Leuwen en riant presque."
Lucien Leuwen ,T.II, chap.LV, (Ed. Gallimard, 1952)

Cette conclusion de LEUWEN est une épitaphe qui aurait pu parfaitement s'adapter au cas de son contemporain, CHATEAUBRIAND : après s'en être beaucoup servi en tant que serviteur de l'Etat notamment comme ambassadeur en Italie, les faits et gestes de l'auteur des "Mémoires d'Outre-Tombe" furent en effet épiés par les autorités par l'intermédiaire de l'invention de Claude CHAPPE, de 1830 jusqu'à sa mort en 1848.
On ignore si STENDHAL a une prémonition ou s'il s'agit d'une connaissance des faits (on sait qu'au moment où il abandonne l'écriture de "Lucien Leuwen", il est Consul de Trieste, puis qu'il séjourne maintes fois dans les Etats Pontificaux à CIVITAVECCHIA jusqu'à sa propre mort en 1842) : la question mérite toutefois d'être posée.
 
Quant à la conclusion de l'ouvrage, on l'empruntera à un auteur contemporain et qui pourrait très bien résumer l'œuvre de STENDHAL:
" La France sait que dix fois en quatre-vingt ans, Paris lui a envoyé des gouvernements tout faits par le télégraphe... "
A. FIERRO, "Paris, histoire et dictionnaire" , (Collection Bouquins, 1996)

 
SOMMAIRE I V. HUGO I H. de BALZAC I CHATEAUBRIAND I STENDHAL I
A. DUMAS I G. FLAUBERT I ERCKMANN-CHATRIAN I Florilège I
TEXTES FONDATEURS
 

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